FOULENCEMENTSJEU DE RÔLE

Sapa Inca sur Game On Tabletop: l’interview d’Eric Dubourg

À l’occasion du prochain lancement de la campagne de financement de Sapa Inca – le nouveau projet des éditions Odonata – nous avons pris contact avec son auteur, Eric Dubourg (L’Appel de Cthulhu, Loup Solitaire…), pour qu’il nous en dise plus sur ce jeu de rôle mêlant fantasy et civilisation précolombienne.

Bonjour Éric, pourrais-tu te présenter aux internautes qui ne te connaîtraient pas ? Ton cursus, ton activité professionnelle en dehors du jeu de rôle, tes autres hobbies, tout ça…

Eric: Bien sûr ! Rôliste depuis le siècle dernier, ça commence à dater mais l’important c’est d’être jeune dans son esprit, pour porter des projets aussi variés que passionnants ! J’ai participé à différents projets (Loup Solitaire, Byzance An 800, Imperator), pour ne citer que les suppléments effectivement imprimés. Et en parallèle, j’avais envie de publier mes scénarios dans des magazines, ce que j’ai effectué pour différents jdr (Seigneur des Anneaux JdR, Vampire Dark Ages, Appel de Cthulhu et Loup Solitaire).

Il fut un temps, vers 2012-2018, je parcourais les conventions avec Opale Rôliste pour concourir à l’essor de notre magnifique loisir. J’y présentais Byzance An 800 pour lequel je fondais de grands espoirs de suite, et j’avais dès cette époque des envies pour les Incas.

Professionnellement, je suis comme beaucoup de rôlistes informaticien pour une société de services, dans mon cas dans le domaine collaboratif (le monde Microsoft), après avoir été longtemps dans la monétique (les terminaux de paiement, ça me connaît). En dehors du jeu de rôles, mon autre loisir est les séries TV, parmi lesquels Star Trek ou les séries / films historiques. Partager de bons moments avec les copains au restaurant ou lors des conventions c’est aussi ce que je recherche.

Quel cheminement t’a conduit vers l’écriture de jeux de rôle ? Et parmi les jeux de rôle qui ont construit ta culture rôlistique, quel est celui qui t’a marqué le plus ?

Eric: Dès que j’ai été initié au jeu de rôle, j’ai toujours voulu concevoir mes propres scénarios, en reprenant parfois ceux du commerce. C’était d’abord à destination de mon propre groupe de joueurs, puis j’ai eu l’envie de publier mes propres scénarios, d’abord sur internet puis dans des magazines, pour des jeux comme l’Appel de Cthulhu, Vampire Dark Ages, Fading Suns et Seigneur des Anneaux JDR.

Étrangement, mes premières publications furent pour le compte d’un prozine outre atlantique, Other Hands, avec lequel j’ai poursuivi une collaboration pendant plusieurs numéros autour de scénarios, d’aides de jeu et de suppléments de contexte pour le sud de la Terre du Milieu, chose que j’ai poursuivi pendant quelques années et qui a abouti cette année à la publication web pdf d’une vingtaine de suppléments PDF comme ceux de la grande époque MERP d’Iron Crown Enterprise.

Après les premiers scénarios autour de l’Histoire, j’ai eu ensuite envie de contribuer à de plus grands projets en français. Le premier fut les développements autour de Loup Solitaire (ce qui se poursuivra peut-être d’ici à quelques années). Il y eut ensuite Byzance An 800, pour lequel j’avais rédigé avec mon comparse Benjamin Ott ses suites, avec une grande campagne à Constantinople et en Asie Mineure et la description de Constantinople. Les Incas représentaient également pour moi un objectif de rédaction dès mon retour du Pérou en 2013. Après un scénario rédigé en 2015, j’ai présenté pour la première fois le jeu au public à Octogônes 2019, puis le jeu a pris sa forme actuelle après deux années et demi de développement avec Odonata.

Sapa Inca est un jeu de rôle qui entraîne meneurs et joueurs au cœur de l’empire inca du XVIe siècle, où l’on croise des lamas et des incas, bien entendu, mais aussi des conquistadors, des missionnaires… et peut-être des dragons ? Sapa Inca, un jeu fantasy ou réaliste?

Eric: Sapa Inca est la route vers l’exotisme que l’on recherche tous, mais cela ne passe pas par les dragons : il n’y en a pas. La priorité du jeu est donnée à jouer les indigènes, même s’il est tout à fait possible de jouer des Espagnols, le bon ratio étant un Espagnol dans le groupe (ou pas d’Espagnols du tout). Au début du projet, il était question d’un jeu de rôle purement historique (le premier scénario rédigé ne faisait pas intervenir les Espagnols), cela a évolué significativement, de ma propre volonté, de celle de Nurthor, de Zediac le Rôliste et de Florent pour aboutir à Sapa Inca.

Le jeu propose un cadre dérivé de l’histoire, qui se veut réaliste. Le point de départ est la supposition que les dieux incas existent réellement, et qu’ils ont donné des pouvoirs aux Incas. Les personnages sont des Amachaq, voués à lutter contre toutes les menaces assaillant l’empire. Cela peut être les Espagnols – ils arrivent en Amérique du Sud sans dragons (j’insiste sur ce point : ils n’existent tout simplement pas dans l’univers de Sapa Inca) et avec toutes les velléités de conquête qui étaient les leurs au XVIe siècle. Certains d’entre eux jouent le mauvais rôle (clairement, Francisco Pizarro ne sera pas un allié des personnages !), mais ils sont là pour rester. Il y a aussi les menaces occultes, les dieux maléfiques, qui font que l’empire n’est plus réellement en paix. Les scénarios se font tout en subtilité, le jeu est plus proche d’un Aquelarre en Espagne, du Nouveau Monde de la Septième Mer que de Donjons & Dragons contexte amérindien.

Sapa Inca - Apu Inti

Avec un thème aussi particulier, n’as-tu pas eu un peu de mal à trouver un éditeur ? Et comment s’est construit ta collaboration avec Odonata ?

Eric: Le fait d’avoir un projet déjà publié (enfin deux : Byzance An 800 et Loup Solitaire) a facilité énormément les choses. En 2019, je devais avoir une cinquantaine de pages rédigées. J’avais une note de cadrage où l’on voyait que le jeu proposé était plutôt dans une lignée historique, et j’ai envoyé, un petit peu au petit bonheur la chance à Florent via Facebook, et il m’a répondu. Quelques semaines plus tard, les échanges commençaient sur le jeu, et au fil des mois, les rédactions se sont enchaînées, si bien que deux années plus tard, le jeu est (presque) prêt à être publié.

Si tu devais convaincre un joueur de se lancer dans l’aventure Sapa Inca, quel argument mettrais-tu en avant ?

Eric: Si vous avez aimé les Mystérieuses Cités d’Or, alors Sapa Inca est fait pour vous. Si vous souhaitez découvrir des peuples originaux et indigènes et moins les Espagnols, Sapa Inca est là pour ça. L’exotisme, le mystère des civilisations disparues, des personnages au contact des animaux et des dieux, voici tout ce que je met en avant.

Quelle est la part d’historique dans le jeu ? Est-ce que le jeu s’appuie sur la frise chronologique de la période et le récit documentaire, avec la conquête des Andes par Pizarro et les Espagnols, ou le meneur aura champ libre pour digresser, quitte à faire dans l’uchronie ?

Eric: L’uchronie est posée dès le départ, de manière à permettre à l’Apu Inti (le meneur ou la meneuse de jeu à Sapa Inca) de se sentir libre par rapport à la chronologie. Les graines de la division, aussi bien entre les Incas eux-mêmes que parmi les Espagnols sont bel et bien là et seront exploitées dans les scénarios à venir. Atahualpa et Huascar se détestent du côté inca, et il y a fort à parier que si le Sapa Inca en titre, Ninan Cuyochi, disparaissait, une lutte pour le pouvoir s’engagerait immédiatement, et cela serait au profit immédiat des Espagnols. Du côté Espagnol, l’attrait de l’or divise même les alliés les plus fidèles, parmi lesquels peuvent être cités Francisco Pizarro et Diego de Almagro.

Quel est l’éventail de personnages disponibles ? Avec le livre de base, on pourra jouer tout autant un personnage inca qu’un européen ? Et si oui, comment est pensée la création de personnage si différents (notamment au niveau du background).

Eric: Dans le livre de découverte, l’accent est mis sur les personnages incas et alliés, donc exclusivement des indigènes. Mais avec le livre de base, il sera possible de jouer des Espagnols qui ont pris le parti de défendre les Incas contre leur propre peuple. Il est proposé différentes professions, telles que les nobles (panaqas), les érudits, les coureurs, les prêtres et shamans pour les indigènes, les conquistadors, les missionnaires, les hidalgos pour les Espagnols. Chaque joueur construit son personnage en choisissant son dieu principal et son animal totem, ce qui orientera son jeu de personnage, selon qu’il choisit Inti (le dieu du Soleil) ou Supay (le dieu de la mort).

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Sous quels angles est appréhendée la magie ?

Eric: La magie est vue sous deux angles, celle des dieux et des animaux. La plupart des sortilèges réussissent automatiquement et sont vus sous l’angle de la low fantasy. Quelques exemples, se transformer en petit nuage pour espionner un camp ennemi, attirer des animaux pour qu’ils apportent de la nourriture ou guident les personnages perdus dans la nature, ou encore convoyer des messages en faisant appel aux animaux.

Peux-tu nous dire un mot sur la motorisation et le système de simulation ? Tu en es l’auteur ? Est-ce un système original, le système des diodes d’Odonata ou un autre système open licence du type SRD ?

Eric: Sapa Inca n’utilise pas le système des diodes ou des blattes d’Omega et d’Insectopia mais un système qui est pensé au plus proche de la civilisation inca. Avec mes comparses, je suis l’auteur du système de jeu, basé exclusivement sur des d8. Quatre caractéristiques nommées d’après les animaux les plus révérés par les Incas, soit le Serpent (la Vipère en fait), le Condor et le Puma, auquel nous avons rajouté le Dauphin pour avoir quatre caractéristiques. Pour tous les tests où le hasard intervient, les joueurs lancent un nombre de dés égal à caractéristique (en dés) plus compétence (en dés). Les succès sont sur le 3 (la croix andine), le 4 (les quatre provinces), le 7 (l’arc-en-ciel et les sept cités secrètes). En fait, tous les chiffres ont une symbolique si l’on cherche bien dans la civilisation inca, excepté le 8 que nous avons choisi pour symboliser l’échec potentiel.

Que propose la campagne de financement ? Sapa Inca est pensé comme une gamme fermée où tout sera disponible lors de la prochaine campagne ou une gamme ouverte destinée à évoluer ?

Eric: La campagne de financement propose le livre de base, le livre univers et l’écran, ainsi que plusieurs goodies tels que les dés, les cartes de l’Empire Inca. La gamme n’est pas fermée, bien au contraire. Les deux livres prévus dans le financement vont apporter les bases pour pouvoir jouer avec une variété de scénarios pour pouvoir commencer.

Ce dyptique de base pourra être étendu lors d’un second financement avec l’Ordre des Amachaq, un recueil de scénarios possiblement rédigés par la communauté de Sapa Inca (à la manière du supplément “La Communauté” pour Insectopia), une grande campagne centrée autour des dieux Incas et des animaux totem (qui existe déjà sous la forme de dix synopsis d’aventure), et un supplément abordant les autres royaumes de l’Amérique du Sud version Sapa Inca. Et sûrement d’autres choses selon les envies, toujours dans l’orbite de l’empire inca.

La gamme pourrait voir un prolongement intéressant avec d’autres civilisations, comme les byzantins, avec un système de jeu conçu au plus proche de la civilisation byzantine, et inspiré de Sapa Inca. Évidemment, une grande partie des textes sont à rédiger, mais l’envie est présente, pour l’avenir. Dans ce cadre, un livre de base centré sur l’empire byzantin et le supplément Constantinople pourrait être un objectif à atteindre. Et cette fois-ci, sans Mythe de Cthulhu et avec un fantastique tout droit inspiré de la Grèce et de Byzance.

Merci Eric. G&P te souhaite une pleine réussite dans ce joli projet!

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Pour accéder à la campagne de financement de Sapa Inca, cliquez sur l’image ci-dessous:

PRÉSENTATION EN VIDÉO DE LA CAMPAGNE SAPA INCA

Une vidéo de présentation de la campagne Game On Tabletop de Sapa Inca, par Florent Moragas, le boss de Odonata Editions.

Nicolas Lamberti

Nicolas Lamberti, journaliste et traducteur freelance, critique littéraire et réalisateur de télévision

Nicolas Lamberti

Nicolas Lamberti, journaliste et traducteur freelance, critique littéraire et réalisateur de télévision

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