CRITIQUEEXCLUSIFJEU DE RÔLE

Against the Darkmaster: la critique

IL ÉTAIT UNE FOIS, ROLEMASTER…

Au début des années 80, la société Iron Crown Enterprise lançait sur le marché du jeu de rôle un système générique. Baptisé Rolemaster, il était destiné aux settings fantasy. Rolemaster, au premier regard, ne semblait pas révolutionner le milieu. Avec sa mécanique basée sur le d100, Rolemaster évoquait un peu le Basic Role Playing de Chaosium. Quant aux personnages, ils ne se démarquaient guère de ceux de D&D ou L’œil Noir. Il suffisait de s’attarder sur l’ouvrage pour relever que des différences importantes étaient cependant bien présentes, notamment pour ce qui concernait l’usage de l’élégant duo de polyèdres.

Innovateur, le système de Rolemaster reposait sur le principe du « jet sans limite ». Chaque résultat compris entre 96-00 entrainait une succession de jets explosifs positifs, et chaque résultat compris entre 01-05 une succession de jets explosifs négatifs (j’en cause en détails un peu plus loin). Une mécanique qui générait une grande variété de résultats, et donc des nuances importantes dans les définitions de coups critiques. D’autant plus que chaque arme, et chaque type d’attaque, bénéficiait de sa propre table d’attaque et de coups critiques. Mariée à des règles accordant une grande importance à l’aspect tactique du jeu de rôle, cette caractéristique faisait de Rolemaster un jeu aussi « simulationniste » que riche en variété, notamment dans la construction des personnages. On pouvait même y incarner des golems.

Malgré toutes ces qualités, Rolemaster, localisé en français par Hexagonal, souffrait d’une mauvaise réputation de jeu de rôle « usine à gaz » et de la quasi absence d’un univers dédié (la gamme Shadow World ne proposait qu’une collection de modules indépendant, bien loin des univers construits et cohérents qu’étaient à l’époque Glorantha, Greyhawk ou Les Royaumes Oubliés). Quant à sa déclinaison « tolkiennesque » utilisant un système allégé – Le jeu de rôle de la Terre du milieu (ou JRTM) -, il trahissait un peu l’esprit de l’œuvre originelle avec la présence d’une magie bien trop accessible, voire commune. Voir une bande d’aventuriers comprenant 3 magiciens se balader en Gondor, cela faisait, il est vrai, un peu bizarre. Toutefois, le jeu se vendit bien, étant le seul à pouvoir satisfaire la communauté de fans du Seigneur des anneaux.

Se positionnant un peu à contre-courant de la vague TSR, notre bande de compagnon.e.s appréciait bien Rolemaster. J’y avais même investi une partie de mes économies. La gamme n’était pas très bon marché et comprenait plusieurs ouvrages indispensables si l’on souhaitait couvrir l’essentiel des règles. On y jouait régulièrement, dans un univers non défini mais proche de celui de Shannara, entre deux campagnes de RuneQuest ou de L’Appel de Cthulhu (nous ne jouions pas à D&D, ni à AD&D, à l’époque). Aussi, quand j’ai appris que LETO lançait une campagne de financement pour une version française d’Against the Darkmaster, je n’ai pas hésité une seconde. J’ai pledgé. Car, oui, Against the Darkmaster, ce n’est ni plus ni moins qu’un OSR de Rolemaster. Et je reste un nostalgique des temps anciens. Qui a dit un boomer réac ?

VUE GÉNÉRALE

Against the Darkmaster n’est pas encore sorti. Il est encore en production. Cette critique est basée sur la lecture (et la mise en pratique) de la version numérique du livre de base qui, en ma qualité de contributeur, m’a été remise par l’éditeur. Je ne peux donc pas me prononcer sur la qualité du papier, de la couverture et autres éléments physiques. Seul le contenu est jugé ici.

Le livre de base d’Against the Darkmaster est présenté sous la forme d’un ouvrage noir & blanc de 568 pages. Un sacré pavé qui regroupe tout le nécessaire pour jouer, c’est-à-dire le système de règles, la partie réservée au meneur de jeu, des scénarios et des annexes regroupant les nombreuses tables essentielles au bon déroulement d’une partie. L’illustration de couverture, fruit du talent d’Anato Finnstark, et exclusive à la version française, est absolument magnifique. Mais les illustrations intérieures, riches en détails et immersives, ne sont pas en reste. La mise en page est claire, le texte bourré d’exemples et d’encarts explicatifs. L’ensemble enjolivé par une élégante maquette. Bref, du superbe travail. On peut également apprécier l’index en fin d’ouvrage qui se révèle, vous vous en doutez, très utile pour retrouver des informations dans un livre à la pagination si importante.

L’ouvrage est divisé en une petite nouvelle de mise dans l’ambiance, une introduction, cinq grandes parties (les livres), une campagne et les fameuses annexes.

LE LIVRE UN : LA CRÉATION DE PERSONNAGE

Après une très agréable nouvelle de Paul Kidd aux allures de sword and sorcery et une introduction assez banale présentant les principes du jeu de rôle, les dés utilisés (uniquement des D100) et les notions de jeu narratif et interactif, les auteurs passent aux choses sérieuses avec la phase de création de personnage.

Dans AtD, un personnage est défini par six caractéristiques générales (Puissance, Coordination, Endurance, Esprit, Clairvoyance et Allure), des compétences culturelles et professionnelles ainsi que des caractéristiques dérivées (points de vie, capacité défensive…). Toutes sont notées sous la forme de bonus de pourcentages.

LES CARACTÉRISTIQUES

Pour déterminer les caractéristiques, le joueur va commencer par effectuer six lancers de D100 et se reporter à une table de conversion. Par exemple, un jet de 65 donne un bonus de +30. Il va ensuite y ajouter ses modificateurs d’Ascendance. Il est également proposé une méthode non aléatoire par répartition de points. Nous avons préféré la première car plus proche de l’esprit de Rolemaster. Le livre de base propose treize Ascendances (races) avec trois types d’Elfes (hé oui !), le Nain, l’Humain, le Premier Homme (Numénoréen ?), le Semi-homme, le Demi-Elfe, le Sauvageon, le Firbolg (un descendant cornu des Géants). Les ascendances d’Orque, Demi-orque et Troll sont également disponibles pour ceux qui prendraient partie pour le Darkmaster.

Ces Ascendances amènent des modificateurs de caractéristiques, de jets de sauvegarde et des points d’Historique. Ainsi, si le Nain bénéficie d’un +15 en Endurance et d’un +20 en Jet de Sauvegarde de Volonté, il subit un malus de -5 en Coordination et en Allure. En plus de cela, chaque Ascendance présente ses propres spécificités raciales réunies sous l’intitulé Traits Spéciaux (le Premier-Homme bénéficie d’un bonus de +15 à sa Compétence de Charisme). Au final, l’on se retrouve avec des profils assez communs. L’Elfe est doté d’un bel intellect et d’une belle allure, le Nain est résistant, le Semi-homme agile… Chaque bonus de Caractéristique obtenu est alors reporté sur les Compétences liées. Ainsi, la Compétence Masses se voit attribué le bonus de Puissance et la Compétence Voyage le bonus de Clairvoyance.

LES COMPÉTENCES

Pour déterminer le score total de ses bonus de Compétences, le joueur va devoir choisir une Culture et une Vocation. Ces choix vont attribuer des Rangs à certaines Compétences. Chaque Rang obtenu amène un bonus supplémentaire de 5% (du moins dans les premiers niveaux) à la Compétence désignée. Ainsi, un personnage issu des Profondeurs obtient 4 Rangs dans la Compétence Masses, 3 dans la Compétence Armure, etc. Les Compétences, au nombre de 22, sont regroupées en 7 catégories (Armure, Combat, Aventure, Roublardise, Savoir, Magie, Corps).

Le joueur a le choix entre treize Cultures. Il va en choisir une en restant en accord avec son Ascendance. S’il joue un Nain, il ne va pas choisir Cercles Féériques, bien sûr (sauf s’il a décidé que son Nain, enfant, a été recueilli et adopté par des Elfes très ouverts d’esprit) mais plutôt Hautes Terres ou, encore mieux, Profondeurs. Chaque culture amène aussi un choix d’équipements de base (les Dotations) et un Niveau de Richesse. Le Niveau de Richesse (ou NR) est l’un des éléments originaux, et intéressants, d’Against de Darkmaster car il simplifie énormément le système économique du jeu. Si vous avez un NR égal ou supérieur à celui de l’objet souhaité, vous vous le procurez (s’il est disponible), sinon soit cela est impossible, soit l’acquisition fait diminuer votre NR de 1 niveau. C’est également le Niveau de Richesse qui va contribuer à définir le Statut Social du personnage.

La Vocation est en quelque sorte la classe du personnage. Il n’y en a que six dans ce livre de base : Guerrier (Gue), Roublard (Rou), Sorcier (Sor), Animiste (Ani), Champion (Chp) et Touche-à-Tout (TaT). Et non, au grand désarroi de l’un de mes compagnons de jeu, il n’y a pas de Prêtre. Cependant, en étudiant les Vocations, l’on se rend compte que l’Animiste peut parfaitement remplir ce rôle. Tout comme le Touche-à-Tout qui peut, en fonction des investissements en bonus, peut faire office de ranger, d’éclaireur, de mercenaires, voire de barde. La force du système de création est au final sa grande souplesse. Ainsi, tous les personnages peuvent avoir accès à la magie (les personnages elfiques restent cependant avantagés), peuvent manipuler tout type d’arme. Et cela au prix de quelques efforts de répartition.

Chaque Vocation attribue aux différentes catégories de Compétence du personnage des bonus de vocations qui sont exprimés en Points d’Évolution. Chaque Point d’Évolution permet d’augmenter d’un Rang une Compétence attachée à la Catégorie. Le joueur peut cependant utiliser deux points pour augmenter d’un Rang une Compétence qui n’est attachée à aucune des deux catégories où il a puisé ces points. Cela autorise vraiment une grande personnalisation de son héros qui, au final, ne va ressembler à aucun autre… si on le désire. La seule limitation est que l’on ne peut augmenter une Compétence de plus de deux rangs par niveau (les Rangs attribués à la création par la Culture n’entre pas dans cette limitation)

Au final, le personnage va avoir des Bonus totaux pour chaque Compétence qui sont la somme de :
– Les éventuels bonus attribué par l’Ascendance
– Les bonus de Culture
– Les bonus de Vocation
– Les éventuels Bonus spéciaux (équipements, historique, etc.)

L’HISTORIQUE, LES PASSIONS ET LES DERNIERS DÉTAILS

L’Historique compose une partie importante de la phase de création de personnage puisqu’il fait le sujet d’un chapitre entier. C’est cette étape qui fait vous permettre de personnaliser l’avatar qui va vous représenter dans l’univers d’AtD.

En fonction de son Ascendance, un personnage dispose d’un certain nombre de Points d’Historique. Le joueur va les dépenser en choisissant des options dans une table présente dans le livre. Chaque Historique présente un niveau Mineur et un niveau Majeur, dont le coût en PH est plus élevé. En fonction de leur nature, ces options amène des bonus dans une Compétence, des objets supplémentaires, des traits de caractère, etc.

Enfin, après avoir calculé le nombre de points de vie, la valeur de Défense (DEF) et des Jets de Sauvegarde, le joueur va déterminer une à trois Passions pour son personnage. Elles sont de trois types (Nature, Allégeance et Motivation) et il préférable de les créer de manière collégiale (avec les autres joueurs et le MJ) car elles permettront de générer un esprit de groupe et d’intégrer naturellement le personnage à la campagne ou au scénario. En jeu, quand un personnage agit en suivant sa Passion, il gagne des points de Pulsion. Points de Pulsion qu’il pourra ensuite dépenser pour relancer un jet de dés raté, obtenir un bonus, booster un sort, etc.

A noter que chaque point dépensé fait progresser le personnage sur sa Voie Héroïque, qui est une manière de faire progresser son personnage (augmentation de Caractéristiques, des Points de Vie ou de Magie). Elle s’ajoute à la plus traditionnelle méthode des XP, qui sont attribués suivant un principe d’Accomplissements (prenant en compte sa Vocation mais aussi ceux du groupe) déterminés en fin de séance. A chaque passage de niveau, le personnage va gagner des Points d’Évolution qui vont lui permettre d’augmenter ses Compétences. On se retrouve ainsi avec deux méthodes de progression qui, ensemble, prennent en compte tous les aspects du personnage.

LA MÉCANIQUE ET L’OPEN00

Against the Darkmaster est motorisé par l’Open00, une mécanique basée sur des jets de D100. Son principe est assez simple et intuitif. Quand un personnage essaie d’accomplir une action dont l’issue est incertaine, il lance un D100 et ajoute au résultat son bonus de Compétence. Pour une action standard (c’est-à-dire sans modificateur de difficulté), si le score total est de 74 ou moins, il s’agit d’un échec (et même un Échec critique si le score est de 4 ou moins). Si le score est compris entre 75 et 99, il s’agit d’une Réussite partielle. Si le score est de 100 ou plus, c’est une Réussite, et même une Réussite critique si le score atteint 175. Vous allez me dire : « mais les chances d’atteindre ces scores extrêmes de 4 ou moins et 175 ou plus sont minimes avec un D100, ce n’est pas logique ! » Oui, c’est vrai, sauf que le jet est un jet ouvert, autrement dit sans limite. Cela signifie que si vous obtenez un résultat aux dés de 96 ou plus, vous relancez les dés et ajouter le nouveau résultat au premier. Et si ce nouveau lancer de dés est de 96 ou plus, vous continuez ainsi jusqu’à ce que vos dés amènent un score de 95 ou moins ! A l’inverse si vous obtenez un score aux dés de 5 ou moins, vous relancez les dés et soustrayez le nouveau résultat au précédent. Et si ce deuxième lancer est de 96 ou plus, vous devez relancer les dés et continuer à soustraire le résultat. Et cela jusqu’à ce que vous obteniez un résultat de 95 ou moins. On se retrouve donc devant une mécanique qui exige un peu de calcul mental (en fin de soirée, cela peut être un peu laborieux) mais qui amène une très grande variété de résultats.

L’OPEN00 ET LES COMBATS

La résolution des conflits suit la même logique. Comme souvent, un combat est divisé en rounds. Ici, les joueurs doivent tous annoncer les intentions de leurs personnages au début du tour, en commençant par le MJ. Dans un round, un personnage agit suivant son type d’arme offensive. Dans le cas d’un sort ou d’un tir, si le personnage a préparé son action lors du tour précédent, il va agir avant les mouvements et les mêlées. Sinon, cela sera en fin de round (au mieux !). Pour la résolution des mêlées, le premier personnage à agir est celui qui bénéficie de l’arme la plus longue, en sachant que certaines situations (attaque par derrière, de flanc) « augmente » la longueur de l’arme.

Quand un personnage exécute une attaque, il effectue un jet de D100 ouvert, ajoute son bonus d’Attaque et déduit du résultat final la DEF de la cible (qui peut être améliorée si le joueur a décidé au début du tour de sacrifier une partie de son bonus d’Attaque en défense). Il se reporte ensuite à la table propre à son type d’arme pour déterminer le résultat. Dans le cas d’un coup critique, il se reporte ensuite à une autre table. Dans le cas d’une Maladresse, il se reporte aussi à une table, unique celle-ci.

Si d’aucun peuvent trouver le système un peu lourd, il n’empêche qu’il va plaire à toutes les tables de joueurs qui apprécient les combats détaillées et « réalistes ». Le combat dans AtD, c’est un festival gore de rotules fracassées, de bras coupées, de cranes écrasés, d’éviscérations et de décapitations. De nombreuses blessures handicapent le personnage, autant de malus qui doivent être pris en compte lors des rounds suivants, car ils fragilisent énormément et épuisent les combattants. Dans AtD, un coup critique bienvenu peut carrément inverser le déroulement d’un affrontement dont l’issue semblait jusqu’alors prévisible. 

Lors d’un combat, un personnage va subir des Dégats, des Saignements et des blessures. Les dégats se mesurent en points de vie perdus. Les blessures sont infligées quand un personnage subit un coup critique et peuvent être légères, graves ou invalidantes. Si les premiers, et les Saignements (sauf l’Exsanguination), se soignent relativement facilement, les autres nécessitent plus de temps et de moyen. Dans AtD, une équipe sans soigneur compétent est très mal barrée. Vraiment très mal.

L’OPEN00 ET LA MAGIE

La magie dans Against the Darkmaster est une force puissante mais difficile à maitriser. Elle est également risquée car à l’utiliser sans discernement, elle peut attirer vers le magicien, tels des nazguls, les serviteurs du Darkmaster.

Même si les Vocations de Sorcier et d’Animiste bénéficient de bonus plus importants et de listes de sorts (les Traditions magiques) supplémentaires, tous les personnages d’AtD peuvent lancer des sorts. Dix Traditions magiques sont en effet accessible à tous et chaque Tradition est composée d’une liste de dix sorts numérotés de 1 à 10, appelés les Amplitudes. Un personnage qui possède un Rang dans une Tradition ne peut lancer que le sort d’Amplitude 1 de cette liste. Par contre, s’il a 2 Rangs dans cette liste, il pourra « altéré » ce sort d’Amplitude 1, ce qui va amener des effets supplémentaires (précisé dans la description du sort) ou lancer un sort d’Amplitude 2.

Par exemple, le sort d’Amplitude 1 de la Tradition Guérison (tradition spécifique à l’Animiste) est Soin. Un personnage qui possède 2 Rangs dans cette liste peut lancer le sort Soin normalement et redonner à un cible 10% de son total de Points de Vie au cours de la prochaine minute. Il peut également décider d’altérer le sort en lui affectant un degré d’Amplitude supplémentaire, ce qui va augmenter le nombre de Points de Vie récupérés de 10% supplémentaire.

Pour lancer un sort, un personnage va dépenser un nombre de Points de Magie égal au degré d’Amplitude du sort puis effectuer un jet ouvert de D100. Après avoir appliqué les éventuels modificateurs de circonstances (sorts improvisées, distance), il va ensuite reporter le résultat sur un Table d’Incantation. Un score supérieur à 50 est une Réussite qui autorise, s’il y a lieu, un Jet de Sauvegarde de la cible. Un score supérieur à 150 est une Réussite critique. A l’inverse, si le score est de 25 ou moins, le lanceur doit effectuer un jet sur la table d’Échec. Le magicien maladroit peut se retrouver Sonné, voire Épuisé, ou pire, risquer d’attirer l’attention des Ténèbres en lançant les dés sur la table de Résonance magique.

Un chapitre de près de 80 pages baptisé le Grimoire décrit en détails les dix Traditions magiques, les 26 Traditions magiques de Vocation et les 2 Traditions magiques des Ténèbres.

MAGE… UN MÉTIER A RISQUES

La table de Résonance magique est utilisée lorsque l’une des deux situations suivantes se produisent :
– Quand un personnage échoue à lancer un sort et qu’il obtient un résultat de 126 ou plus sur la table d’Échec.
– Quand un personnage obtient un double (1,1 ; 2,2 ; etc.) sur son jet d’Incantation.

La Résonance magique est un des aspects importants de la magie dans Against the Darkmaster. Elle matérialise en jeu le fait que le Maître des Ténèbres est à l’affut de toute manifestation magique pouvant signaler la présence d’individus capable de remettre en cause ses plans maléfiques. Quand le Maître des Ténèbres sent une dépense d’énergie d’origine magique, il tente de localiser la position du mage. S’il y parvient, il va lui envoyer l’un de ses serviteurs ou tenter de l’attaquer mentalement. Quel que soit le résultat, le lanceur de sort va dorénavant voir son existence directement menacée.

VOYAGER AU PAYS DU DARKMASTER

Si Against the Darkmaster ne présente en version originale d’un embryon de monde dédié (Les 9 Royaumes), le livre de règles accorde une grande place à la gestion des voyages.

En plus des règles sur les mouvements terrestres et maritimes et sur l’encombrement, ce chapitre contient une partie explicative sur les périls, qui sont des obstacles qui se dressent sur le chemin des aventuriers et qu’ils devront surmonter sous peine d’être ralenti, voire blessés.

Ces Périls sont de différents types : la météo (pluie, vent, froid intense), la nature du terrain (marais, falaise), des anciennes ruines, des bêtes sauvages, des mauvaises rencontres (serviteurs des ténèbres, brigands, tribus hostiles). Le MJ est libre de créé ses propres Périls ou utiliser les tables fournies dans le livre, qui classent les Périls par zone (Zone boisée, Désert, Marais, Eaux, Montagnes, Plaines.

La règle permet aussi de gérer la fiabilité d’un Campement via des jets de Voyage sur une table d’évènements. Un succès permet au groupe de trouver un lieu sécurisé où ils pourront passer la nuit.  Les personnages peuvent tenter également de localiser un Refuge dans lesquels les aventuriers pourront se reposer en toute sécurité. Un bon jet de Chants & Contes permet de localiser un Refuge fiable qui pourra leur servir tout au long de la Campagne. Ces Refuges sont de types divers, de tailles variées, abandonnés ou occupés. Ils peuvent même servir de décor pour un scénario.

LES BONS OUTILS FONT LES BONS OUVRIERS

Un long chapitre est consacré à présenter les différentes armes et armures, ainsi que les divers équipements disponibles. Pour acquérir un objet ou un service, le joueur doit prendre en compte le Niveau de Richesse de son personnage, qui est compris entre 0 (sans le sou) et 5 (Haute Noblesse) et qui représente également son statut social.

Si le personnage a un NR supérieur au Tarif, il peut acquérir sans problème le service ou l’objet souhaité. Si le NR est égal au Tarif, il le peut également mais son NR se voit diminuer de 1. Par contre, c’est impossible si le Tarif est supérieur au NR du personnage.

Les tables présentées dans ce livre fournissent pour chaque article son Tarif mais aussi sa Disponibilité (Common, Peu commun, Rare). Chaque Armure est définie par un Type (léger, moyen ou lourd), une Zone Protégée, une pénalité de Mouvement et de Perception, une valeur de COO mx et, éventuellement, un bonus de DEF.

Chaque Arme est se voit définie par :
– La Compétence sollicitée (Lames pour une épée, Arme à distance pour une arbalète…)
– Le risque de Maladresse
– Sa Longueur
– La table d’Attaque à utiliser (Tranchant pour une épée, A distance pour une arbalète…)
– Le score d’Attaque maximal (140 pour une épée, 150 pour une arbalète…)
– La table de Coup Critique à utiliser (Taille pour une épée, Perforation pour une arbalète…)
– La portée pour les armes à distance
– Son niveau de Qualité.

DERRIÈRE L’ÉCRAN… LE DARKMASTER

Plusieurs longs chapitres forment un ensemble de règles et de conseils délivrés au meneur de jeu. S’il débute par des propos peu originaux, ils sont suivis par des aides de jeu très utiles sur la création de Campagne. Accompagnée d’un encart permettant de créer de nouvelles Cultures en accord avec son setting, il délivre un bon nombre d’informations utiles, à grand renfort de tables, sur le processus de création de PNJ et de sbires, ainsi que sur leur réaction lors d’une rencontre et leur gestion en combat.

Etant donné que le livre de règles n’est attaché à aucun univers, le chapitre Le Maître des Ténèbres va vous permettre de créer votre propre Darkmaster, avec son nom, son épithète, ses objectifs, son appararence, ses origines, la nature de ses serviteurs, etc. Evidemment, tout cela est optionnel. Si vous savez exactement ce que vous voulez opposer aux aventuriers, vous pouvez vous en passer. Mais l’initiative est très intéressante, plutôt complète et bien mise en forme.

Le MJ va devoir également gérer le niveau de Corruption des PNJS mais aussi des personnages-joueurs qui peuvent être corrompus, par exemple, en entrant en contact avec un Objet Magique Corrompu ou en apprenant des Traditions magiques ténébreuses. La Corruption va s’attaquer aux Passions des personnages en les transformant en Passions Ténèbreuses, en Obsessions. Petit à petit, les personnages vont perdre leur libre arbitre pour, s’il insiste dans cette voie, devenir injouables et rejoindre le camp du Darkmaster.

Trois exemples de Maître des Ténèbres et des serviteurs sont proposés comme exemples au MJ : le Roi Cornu d’Annwn et ses servants morts-vivants, la Reine Sorcière du Désespoir et ses vampires, goules et loups-garous, le Sanglant Seigneur de Guerre et ses troupes chaotiques. Ils sont accompagnés des Traditions Magie noire et Nécromancie.

Après un chapitre destinée à gérer la participation de manière simple des personnages à de grandes batailles, et de mettre leurs actions héroïques en valeur (une armée ennemie présente une valeur de Menace entre 1 et 10, et les actions de personnages contribuent à diminuer cette valeur), cette partie réservée au MJ s’achève sur la méthode d’attribution de récompenses, des listes d’artefacts magiques avec leurs propriétés et d’objets de valeur.

LA FAUNE DU DARKMASTER

Le bestiaire est un imposant chapitre où sont présentées un grand nombre de créatures plus ou moins puissantes, plus ou moins magiques. Il y en a vraiment pour tous les gouts. Et tous les nouveaux bien sûr. Chaque animal, monstres ou créature intelligence se voit consacrer une à deux pages avec une description détaillée, ses variations, ses caractéristiques chiffrées, ses capacités spéciales, ses techniques de combat, etc.

EN AVANT POUR L’AVENTURE !

Le livre s’achève non pas sur un scénario d’introduction mais sur une véritable campagne pour joueurs débutants. Ombre sur les Bois du Nord est une campagne en trois parties et à la fin ouverte qui peut être transposé dans n’importe quel univers de fantasy.

Je ne dirai pas plus que cette aventure est une véritable occasion pour les joueurs de découvrir une partie de l’important éventail de possibilités qu’offre Against the Darkmaster.

L’AVIS DE G&P

Against the Darkmaster est un ensemble de règles pour gérer des parties de jeu de rôle dans un univers fantasy non défini. Il n’y a en effet aucun monde dédié, même si des scénarios parus en version anglaise situent leur action dans un embryon d’univers : les Neuf Royaumes. Mais la force d’AtD se situe ailleurs : dans la richesse de sa mécanique.

Motorisée par l’Open00 et ses jets ouverts de D100, le système de AtD génère une imagerie épique très forte, qui évoque les grands récits de dark fantasy et de sword and sorcery. Avec AtD, on se retrouve devant un ensemble de règles couvrant tous les aspects du jeu de rôle fantasy : un grimoire et un bestiaire imposant, une masse d’aides de jeu pour gérer le voyage, les PNJs, les batailles, et, cerise sur le gâteau, une véritable campagne pour se lancer rapidement dans l’aventure. Enfin, il est juste de signaler la présence de nombreuses et belles illustrations en N&B, parfois en pleine page.

Si les tables de jeu appréciant les jeux de rôle aux systèmes très simples en sont assurément pas les cibles des éditeurs d’Against the Darkmaster, pour les amateurs de règles touffues dotées d’un aspect tactique imposant, Against the Darkmaster, digne héritier de Rolemaster, est un indispensable. Perso, je suis fan.

LA FICHE TECHNIQUE

AGAINST THE DARKMASTER, LE LIVRE DE RÈGLES

Création: Massimiliano Caracristi
Direction artistique: Tommaso Galmacci
Illustration de couverture: Anato Finnstark
Illustrations: Francesco Saverio Ferrara, Tommaso Galmacci, Rich Longmore, Heraldo Mussolini, Andrea Piparo, Marcin Ściolny
Cartes et plans: Tommaso Galmacci, Glynn Seal
Fiches de personnage: Amber Seger
Nouvelle: Paul Kidd
Traduction: Quentin Bernichon, Alexandre Deyne
Matériel: livre de 568 N&B pages format A4
Edition: Le Troisième Œil

Nicolas Lamberti

Nicolas Lamberti, journaliste et traducteur freelance, critique littéraire et réalisateur de télévision

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