Longstreet est une règle de jeu d’Histoire qui a pour but de reconstituer des affrontements de la Guerre Civile Américaine à l’échelle régimentaire.  Son concepteur, l’américain Sam A. Mustafa (Grande Armée, Might & Reason), est réputé pour l’efficacité et la simplicité de ses systèmes. Ici, avec Longstreet, il ne dément pas sa réputation en proposant aux joueurs une mécanique très simple, basée sur une système d’activation par cartes, qui évoque un peu (pour ceux qui connaissent) la règle Maurice, destinée aux armées des Lumières.

Petit tour d’horizon.

Tout d’abord, avant de parler du ramage, que dire du plumage ? Comme à son habitude, Sam A . Mustafa nous propose là un superbe livre (environ 160 pages), riche en schémas explicatifs et en illustrations couleurs. Le texte est très aéré, la lecture (dans un anglais très accessible) facile, d’autant plus que l’ouvrage fourmille d’exemples. Le concepteur se permet même de nombreux traits d’humour qui rendent la découverte de la règle d’autant plus agréable. Le livre est divisé en deux parties. La première fournit les règles de base, le système de jeu solo et une dizaine de scénarios. Dans la seconde, les joueurs peuvent trouver des règles avancées permettant de donner plus de finesse au jeu, ainsi qu’un système pour créer des campagnes qui mettent en jeu la carrière d’un personnage-joueur (via l’utilisation de cartes campagne et biographie).

Longstreet n’a pas vraiment comme objectif de reconstituer de grandes batailles (cela peut cependant se faire). De par son aspect « ludique » (il est souvent fait appel au raisonnement logique des joueurs pour résoudre des situations imprévues)  elle n’est pas non plus conçue comme une règle de tournoi. On peut alors se demander quel est son intérêt ? En fait, Longstreet se prête parfaitement au jeu en club et aux petites séances décontractées à deux joueurs. Les parties sont relativement courtes, l’espace de jeu exigé très raisonnable (une table de 1m60 sur 1m20 suffit largement), et le manuel contient tout le nécessaire pour la construction de petites campagnes en club, ou entre amis.

Image

Dans Longstreet, chaque joueur incarne un officier supérieur (de brigade ou de division, au grand maximum) ayant sous ses ordres une petite quantité d’unités. Ces unités sont constituées d’un nombre variable de socles (de 2 à 10 pour l’infanterie et la cavalerie, de 1 à 3 pour l’artillerie) et représentent des régiments ou des batteries de canons. Il est bon de noter que si la règle propose un système de soclage, presque tous les types déjà existants peuvent être utilisés, du moment que les socles présentent une forme proche du carré (l’essentiel est qu’ils soient plus large que profond). Les joueurs de Fire & Fury, Billy Yank et Johnny Reb voulant tester Longstreet pourront le faire sans avoir besoin de resocler leurs armées. Ouf!

Chaque joueur doit posséder son propre deck de cartes. C’est peut-être le point le plus négatif du jeu, car, contrairement à la règle disponible en PDF, ces cartes ne peuvent être téléchargées sur le site de l’auteur. Il faut les commander aux Etats-Unis, avec le surcoût que cela entraine. Une fois que les joueurs ont disposé leurs troupes sur la table de manière assez classique (la règle propose quelques scénarios, et un système de placement de décors), ils vont se constituer une main de 6 cartes « action » aux usages variés. Le joueur actif (le système est alterné, chaque joueur étant, son tour venu, le joueur actif et le joueur passif) va pouvoir utiliser ses cartes actions pour déclencher une phase de jeu (tir, mouvement, combat) et la modifier (il faut pour cela jouer une carte action correspondant à la phase en cours – tir, mouvement ou combat). Le joueur passif, lui, peut jouer une carte action « interruption » par tour, qui contrarie la phase de l’adversaire. Les cartes action lui servent aussi à limiter les pertes au combat (chaque carte présente une valeur de moral qui diminue d’autant les pertes).

Image
Carte action

 Une phase de jeu se divise en plusieurs phases :

1/  Durant son tour, le joueur actif a tout d’abord la possibilité de rebattre les cartes de son deck (c’est obligatoire quand la pioche est épuisée).

2/ Ensuite, il peut déclencher une Phase de tir-  mais ce n’est pas obligatoire ! Il faut noter que les unités qui ont fait feu ne peuvent entrer en mêlée dans le tour.  S’il décide de déclencher une phase de tir, le joueur actif peut faire tirer tous les socles qui ont une unité ennemie à distance de tir et dans l’angle de visée. Pour chaque socle il jette une ou deux fois un D6. La première fois, il s’agit d’un jet pour «  toucher ». Si ce jet est réussi, on effectue un nouveau jet de D6 pour « tuer ». Le score à atteindre dépend bien évidemment des qualités intrinsèques du tireur et de la situation de jeu. Par exemple, un socle de Recrues (les troupes les moins performantes) « touchent », dans des conditions optimales, sur 5-6 et « tuent » sur 4-5-6.

3/ La troisième phase représente le cœur du système. Là, le joueur actif doit choisir entre déclencher une phase de mouvement, une phase de combat (la charge) ou passer son tour. Cela concerne toutes les unités de son armée. Ainsi, si le joueur actif déclenche une phase de mouvement, toutes ses unités peuvent bouger, et aucune ne peut charger. Pour résoudre une mêlée, les joueurs comptabilisent le nombre de socles engagés et jette un D6 par socle. Un comparatif des scores obtenus est alors effectué pour déterminer quel camp sort vainqueur de la mêlée. Le vaincu devra replier en subissant des pertes.

4/ Dans la dernière phase du tour, les joueurs refont leur main de six cartes et testent pour la victoire (qui dépend des pertes infligées à l’adversaire et des objectifs contrôlés).

Image

Longstreet est une règle novatrice car elle ne possède pas de système de commandement, ni de règle de moral. Tout est géré par les cartes. Ainsi, pour déclencher une phase de mouvement au cours de laquelle on envisage de faire effectuer un « mouvement difficile » à une unité (mouvement par le flanc, traversée d’un terrain difficile, interpénétration d’une unité amie, etc), le joueur actif doit dépenser deux cartes actions au lieu d’une normalement.  La gestion du moral se fait également via les cartes actions, car elles permettent de limiter les pertes et leur nombre est limité par la classe de l’unité (une unité de vétérans peut se voir attribué deux cartes actions pour leur valeur de moral, alors qu’une unité de recrues ne peut en recevoir qu’une). Quand à l’absence de rayon de  commandement, Sam A. Mustafa pose le postulat que l’échelle régimentaire du jeu permet à l’officier supérieur de se rendre rapidement où sa présence est nécessaire.

Dans  les règles avancées, les joueurs trouveront un très sympathique système de construction de campagne présentant d’ailleurs quelques petits aspects rolistes. En effet, les joueurs y incarnent un officier supérieur (généré par un système de cartes «biographie ») qui, au fil des batailles (une dizaine de batailles, entre 1861 et 1865), va gagner en prestige et en grade, à un rythme dépendant de ses agissements sur la table de jeu. L’efficacité est gérée mais également la bravoure et le sens du devoir, ce qui fait que même si le joueur perd une bataille, son personnage peut en tirer bénéfice. Entre chaque bataille, chaque joueur va piocher des cartes campagnes qui vont apporter des modifications à ses unités (renforts, troupes spéciales, etc.) En fin de campagne, le joueur ayant acquit le plus « d’aigles » est désigné vainqueur.

Image

Carte campagne

 CONCLUSION :

Avec son système de règles simple et intuitif (et une mécanique « cartes+ dés » entretenant un élément aléatoire assez fort), et son système de campagne qui devrait plaire aux rôlistes, Longstreet s’adresse plus particulièrement aux joueurs casuals désirant passer deux ou trois heures à pousser de la figurine dans une ambiance bon enfant. Cela ne veut pas dire que le jeu est basique, loin de là, il est au contraire extrêmement bien étudié et calibré pour une utilisation ludique. Les joueurs axés sur la compétition, ainsi que les plus « simulationnistes », trouveront cependant que Longstreet ne peut guère répondre à leurs attentes. Par contre, il est bon de mettre en avant le système baptisé Grande Campagne, dans lequel la règle de Sam A. Mustafa dévoile ses multiples qualités, et qui devrait faire le bonheur des joueurs de club.

TRADUCTION:

Longstreet est une règle américaine rédigée en langue anglaise, disponible sur le site de Sam A. Mustafa ou dans les boutiques VPC. Le site Honour propose la traduction, en téléchargement libre, d’une version lite. Une bonne solution pour tester le jeu avant d’investir dans l’achet d’une règle et de deux paquets de cartes. A coté de cela, sachez que j’ai effectué une traduction complète de la règle. Je la mets à la disposition (gratuitement, bien sûr !) de tous ceux ayant acheté la version originale.

Ma côte: 4,5/5

Nicolas Lamberti

Nicolas Lamberti, journaliste et traducteur freelance, critique littéraire et réalisateur de télévision

Nicolas Lamberti

Nicolas Lamberti, journaliste et traducteur freelance, critique littéraire et réalisateur de télévision

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *