Akrotiri est un jeu de plateau pour deux joueurs ramené de mon escapade parisienne de la semaine dernière qui , inévitablement, se devait de faire un détour par L’œuf Cube, vénérable boutique spécialisée installée dans le quartier de Jussieu depuis la fin des années 70.

Le thème sur lequel est construit Akrotiri est plus qu’abstrait. Conçu par Jay Cormier et Sen-foong Lim, ce jeu édité en français par Filosolia est en fait un jeu de réflexion-stratégie à « l’allemande », comprenez qu’ici c’est le thème qui a été collé sur la mécanique et non l’inverse. En conséquence, il faut donc savoir que cette histoire d’exploration de la mer Egée à la recherche de temples enfouis Minoens n’est globalement ressentie que par la cosmétique du produit et sa ligne graphique. Deux éléments qui sont d’ailleurs plutôt réussis.

Ceci dit, intrinsèquement, que vaut ce jeu ? Tout d’abord, je me dois de préciser que, question matériel, au regard du prix du produit (28€), Filosolia ne se moque pas du client avec une boîte très bien remplie. Seuls un ou deux petits détails, comme des feuilles de marque un peu fragiles et des pièces de monnaie un brin trop petites, viennent un peu gâcher le tableau. A peine. Bref, si les jeux à deux joueurs font en général dans la simplicité (voir le cheap), avec Akrotiri, on se situe largement au-dessus de la moyenne.

Venons-en au cœur du sujet. Le thème nous entraîne de nombreux siècles en arrière, à la période classique, sur l’île de Thera (aujourd’hui Santorin), où se situe le site d’Akrotiri. Chaque joueur, ayant son port d’attache sur l’île, incarne un navigateur qui va explorer l’archipel Hellène à la recherche de prestigieux temples cachés. Mais pour financer ses expéditions et ses fouilles, il va lui falloir des drachmes, beaucoup de drachmes, qui peuvent être gagnées en exploitant les ressources trouvées sur ces mêmes îles. Tout un programme…

Mise en place du jeu, avec la tuile Thera et les deux premières tuiles posées par les deux joueurs

Dans les faits, Akrotiri, c’est du placement de tuiles et de l’exploitation de ressources (collecte et livraison). Un système qui va se révéler très intéressant pour tout joueur aimant faire travailler ses méninges jusqu’à la surchauffe. Oui, amateurs de fun et d’ambiance festive, passez votre chemin car Akrotiri, c’est une bonne heure de réflexion très intense qui, de plus, pour se révéler efficace, nécessite une bonne maîtrise du système. ! Pas de place pour le hasard (encore qu’il apparait un peu par la pioche des tuiles), le seul mot d’ordre est un total contrôle !

Le coin d’un joueur

La mise en place du jeu comprend la pose d’une grande tuile qui représente l’île de Thera. Chaque joueur pioche alors deux cartes Plan et une tuile qu’ils doivent placer à côté de la tuile de départ en y adjoignant les deux marqueurs Ressources associés (la nature d’un marqueur est déterminée par l’icône présent sur la tuile, le deuxième est au choix du joueur). Les ressources sont représentées par des icônes Volcan, Montagne, Forêt et Mer. Ces icones indiquent la nature de la Ressource qui doit être posée sur le plateau en même temps que la tuile mais sert aussi de points de localisation pour l’utilisation des cartes Plan. En effet, les joueurs ne peuvent effectuer des fouilles que sur des îles qui se trouvent dans des zones validées par les indications fournies par les cartes Plan (du style « carte au trésor ») qu’ils tiennent en main.

Le plateau modulable après quelques tours de jeu

Cabotant d’îles en îles via des lignes de navigation qui varient avec la pose des tuiles (assez difficiles à appréhender lors des premières parties), les joueurs vont récolter des ressources pour les revendre une fois retourné à Thera. L’argent gagné sert ensuite à payer la pose de cartes Plan (ou en acheter de nouvelles), qui permettent au joueur de poser un de ses pions Temple sur l’île explorée et de gagner des points de victoire. A chaque tour, les joueurs vont piocher des tuiles et les poser sur la table, agrandissant ainsi plateau de jeu et les zones à explorer. L’un des aspects intéressants du jeu, et qui augmente le rythme de la partie au fil des tours, est que plus un joueur place de Temples sur le plateau, plus le nombre d’actions qui lui est autorisé (déplacement du navire, fouille, achat de cartes, choix de tuiles, etc.) augmente. De plus, il obtient des cartes Objectif qui, si remplis, lui rapportent des points de victoire supplémentaires lors du décompte final. A côté de cela, un système d’échelle entraine que plus grand est le nombre de ressources placées sur le plateau de jeu, plus leur vente sur Thera est lucrative. Un autre aspect du jeu à considérer.

Le jeu s’achève une fois qu’un joueur a posé ses six pions Temple sur le plateau de jeu. Les joueurs comptabilisent alors leurs points de victoire, qui découlent des cartes Plans jouées, des objectifs remplis et de l’argent dans les caisses.

Le jeu en fin de partie

Akrotiri est un jeu aussi complexe que captivant. Passée une rude période d’apprentissage (la durée de jeu est estimée à ¾ d’heures, hors notre première partie a duré près de… trois heures !), l’on peut se rendre compte que ce jeu est d’une extrême richesse. Les méthodes pour remporter la partie sont multiples, les facteurs de solution à considérer sont nombreux et, de plus, le système de tuiles permet un bon renouvellement des parties. Filosolia nous propose là un jeu à deux de très belle facture, apte à satisfaire tout joueur amateur de jeu de réflexion.

Voilà une petite grille que je reprendrais régulièrement lors de mes billets sur divers jeux de plateau.

AKROTIRI

Un jeu de Jay Cormier et Sen-foong Lim

Edité par Filosofia (2014)

Deux joueurs

A partir de 13 ans

Environ 45 minutes

Nicolas Lamberti

Nicolas Lamberti, journaliste et traducteur freelance, critique littéraire et réalisateur de télévision

Nicolas Lamberti

Nicolas Lamberti, journaliste et traducteur freelance, critique littéraire et réalisateur de télévision

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