On ne compte plus le nombre de jeux d’enquête grand public qui ont envahi les rayons des boutiques depuis la sortie du CLUEDO. Le filon a cependant commencé à s’épuiser à la fin des années 90, la mécanique affichant de trop ses aspects désuets. Au début des années 2000, SHERLOCK HOLMES, DETECTIVE CONSEIL relançait le genre en innovant avec son mode coopératif, qui est par ailleurs devenu très tendance ces dernières années. Pour preuve, c’est DÉTECTIVE, un jeu coop’, qui s’est vu décerné l’As d’or, dans la catégorie Expert, du dernier FIJ.

MINUIT, MEUTRE EN MER, avec son mode compétitif propose un retour aux sources. Dans ce jeu d’Alain LUTTRINGER, les joueurs ont pour but de trouver le coupable d’un meurtre qui a eu lieu sur un navire de croisière. Pour cela, ils devront enquêter chacun de leur côté, interroger les suspects et fouiller les lieux, tout en surveillant les agissements des autres joueurs. Le premier qui trouve le coupable, ou qui propose la solution la plus juste quand le bateau atteint son port de destination, remporte la partie.

Sans atteindre le luxe de l’édition Space Cowboys de SHERLOCK HOLMES, DETECTIVE CONSEIL, les éditions MULTIFACES proposent avec MINUIT, MEURTRE EN MER un produit de belle facture, en faisant dans le classique éprouvé. Une boîte solide, à la cosmétique sobre mais révélatrice et élégante, qui contient le livet de règles, deux livrets de scénarios, un carnet de feuille de notes, des meeples représentant les joueurs enquêteurs mais aussi les suspects, le commissaire de bord, un pion Navire, un deck de cartes événement, un d10 et six jetons bouée (qui feront office de points d’action bonus). Un solide plateau de jeu représente le navire en coupe, avec ses 3 ponts divisés en zones. C’est tout. Ça suffit.

LES PRINCIPES DE JEU

MINUIT, MEURTRE EN MER est un jeu pour deux à six joueurs. Chaque joueur incarne un enquêteur cherchant à élucider une affaire de meurtre. La boîte de base propose vingt scénarios, qui obéissent tous aux mêmes postulats : le meurtre a toujours lieu entre 23h45 et minuit ; il n’y a toujours qu’un seul coupable ; le coupable est le seul suspect à mentir ; le crime a toujours lieu dans la suite de luxe. Forts de ces informations, les joueurs vont alors déplacer leurs meeples dans le navire pour fouiller les lieux (en fait, la plupart du temps, cela correspond à questionner l’équipage) ou interroger les vingt suspects présents sur le plateau. Le premier joueur se voit également confier la tâche de tirer à chaque début de tour une carte événement qui ajoute un peu de piment au jeu et de lancer un d10 pour déplacer le commissaire de bord, un grincheux qui n’apprécie pas les curieux (on ne peut enquêter dans la zone où il se trouve).

Lorsque vient son tour, un joueur dispose de 4 points d’action. Se déplacer d’une zone nécessite la dépense d’un point d’action. Pour interroger un suspect, c’est variable. Si le joueur veut être le seul à connaitre la réponse, cela lui coute 3 points d’action, ou 2 points d’action s’il accepte de tenter sa chance en lançant un d10 (sur un score de 8 à 10, le suspect l’envoie aux fraises). Par contre, s’il lit la réponse à haute voix, cela ne coûte qu’un point d’action (mais le jet de d10 doit également être effectué). L’interrogation doit porter sur l’un de ces trois sujets : alibi, mobile et témoin. Sur le livret, chaque question correspond à un nombre qui renvoie à la réponse appropriée. Classique.

Chaque suspect est donc susceptible de fournir trois informations. Aux joueurs la tache de recouper toutes les informations collectées au fil du jeu pour établir leurs théories et faire leurs propositions portant sur trois points : identité du coupable, son mobile et le mode opératoire (un peu comme le CLuedo, le mobile remplaçant le lieu). Quand un joueur pense avoir trouvé la solution, il doit se rendre dans la zone du grand salon pour y faire ses révélations. Qu’il ait tort ou raison, la partie prend fin à ce moment. On calcule alors les points de victoire en obéissant à un barème, pour établir un classement.

L’AVIS DE G&P

MINUIT, MEURTRE EN MER propose aux joueurs un challenge intéressant, dans des conditions de jeu confortables. Les règles, très simples, rendent le produit accessible au grand public et permettent aux joueurs de se concentrer sur l’investigation. Le thème de chaque enquête, comme les réponses des suspects et les résultats des fouilles, génère une étonnante et amusante atmosphère immersive. On s’imagine facilement dans la peau d’une miss Marple ou d’un Hercule Poireau des années 80, à bord d’un navire commandé par la capitaine Stubing, croisant Julie McCoy au hasard d’une coursive. Au fil des scénarios, la difficulté augmente et si les premières enquêtes sont très faciles à résoudre (c’est finalement le plus preste à arriver au grand salon qui l’emporte), il en est tout autre par la suite et certaines se posent comme de sacrés défis. La notion de temps ajoute également au stress. En effet, l’avance des tours est fluctuante car il est géré par le tirage des cartes événements ; l’échelle des tours de jeu est de dix cases et la carte Mer Calme, fait avancer, par exemple, le pion navire de deux cases ! Optimiser ses mouvements, pour éviter les déplacements inutiles, est un impératif !

On peut également apprécier les livrets de scénarios, à la numérotation bien pensée et imprimés dans un format pratique. La présence d’un marque-page est également appréciable. Certains joueurs trouveront cependant pénible cette obligation de renvoi permanent au livret à chaque interrogation, mais c’est une contrainte commune à tous les jeux d’enquête. Si MINUIT, MEURTRE EN MER est un jeu compétitif, il faut signaler que l’interactivité entre les joueurs est quasi nulle. Elle se limite à surveiller les joueurs (et leurs comportements) et à les gêner en déplaçant un suspect en fin de tour (vous pouvez approcher un suspect de vous pour l’interroger mais également l’éloigner d’un joueur qui semble vouloir le questionner).

LES PLUS
– Des règles simples.
– Du matériel agréable à manipuler
– Des enquêtes à la difficulté croissante
– Un aspect immersif

LES MOINS
– L’aspect aléatoire (corrigé dans l’extension)
– Le mode de jeu, qui peut agacer

MINUIT, MEURTRE EN MER
Un jeu d’Alain LUTTRINGER
Illustrations de Fabrice WEISS et Baptiste REYMANN
Un jeu MULTIFACES EDITIONS (2017)

Nicolas Lamberti

Nicolas Lamberti, journaliste et traducteur freelance, critique littéraire et réalisateur de télévision

Nicolas Lamberti

Nicolas Lamberti, journaliste et traducteur freelance, critique littéraire et réalisateur de télévision

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